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Le collège de l’Esquille demande des cartes de géographie et des prix à distribuer en fin d’année (1766)

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Mémoire adressé par le père préfet du Collège de l’Esquille de Toulouse, tenu par les Doctrinaires (congrégation religieuse), à destination des Capitouls (magistrats municipaux de Toulouse) en 1766 (date précise inconnue), afin de demander des cartes de géographie et le versement d’une somme fixe pour acheter des prix à remettre aux écoliers les plus méritants. Les justifications exposées sont d’un grand intérêt historique. Suit une liste des prix distribués par le collège en l’année 1719.

Mémoire
Première page du mémoire.
Cliquez pour agrandir.

Transcription :

« Mémoire

du père préfet du Collège de l’Esquille
pour demmander à Messieurs les Capitouls,
des cartes de géographie et des prix pour les basses classes
avec l’anticipation des vacances.

Messieurs

Dans le nouvel ordre d’enseignement, que nous observons aujourd’huy dans les classes, l’étude de la géographie est devenue entièrement nécessaire et indispensable. Il est impossible sans ce secours de pouvoir donner aux jeunes gens une parfaite intelligence des auteurs, qu’on leur met sous les yeux. Comment en effet leur faire entendre les poëtes et les historiens, s’ils ne sont déjà prémunis des connoissances de la géographie ? N’ayant rien qui fixe leurs idées, ils confondent un lieu avec un autre, ils prendront une ville pour une province, et une province pour un royaume. Qu’on leur procure des cartes géographiques, et ils ne tomberont plus dans des pareilles erreurs. Fixés par une connoissance exacte des différentes parties du monde, ils parcourront de leurs propres yeux, les lieux où se sont passés les événemens les plus mémorables. Ils suivront un héros dans les pays les plus reculés sans crainte de s’égarer. Tous ces avantages seroient évidemment perdus pour eux, sans le secours de la géographie. Il faut donc convennir qu’elle est absolument nécessaire pour le progrès et la facilité des études.

C’est cette considération, Messieurs, qui m’a principallement déterminé à vous présenter ce petit mémoire pour vous demmander des cartes géographiques pour les étudians du collège de l’Esquille, avec un globe terrestre et une sphère. La dépense n’en sera pas fort considérable, et le collège se chargera de l’entretien.

Si nous ne craignions d’être à charge à vos bontés, nous ozerions vous proposer un autre objet égallement important pour l’avancement des études. Ce seroit de fixer des prix pour les basses classes, comme en a fixé pour la rhétorique, il y a plus d’un siècle, un généreux citoyen de cette ville ; vous ne sauriés rien faire de plus digne de vous, ni de plus avantageux pour la célébrité, et les progrès des études dans votre collège.

Notre auguste prélat aussi recommandable par ses grandes lumières que par son zèle pour le bien public, en fit luy-même, il y a deux ans, la demmande en plein bureau à Messieurs vos prédécesseurs. Qu’il me soit permis de vous la renouveller aujourd’huy cette demmande, en y ajoutant les motifs qui doivent vous décider.

Le premier qui se présente et le plus essentier, est d’exiter l’émulation dans les classes. Quel bien ne résulteroit-il pas de cette émulation ? Les jeunes gens encouragés par l’espoir d’une récompense assurée, se porteroient au travail avec plus de zèle et plus d’ardeur. L’étude, qui ne leur offre, que de la répugnance et du dégoût, n’auroit plus pour eux que des attraits et des agrémens. Les talens animés par le succès seroient cultivés avec plus de soins et l’on verroit peu à peu se former des citoyens utiles à l’Eglise et à l’Etat.

Ce n’est pas ici une conjecture hazardée que me fasse exagérer tous ces avantages ; c’est une vérité de fait, dont il est aisé de se convaincre par les bons effets qu’ont produit jusqu’ici dans les classes, les prix modiques que Messieurs vos prédécesseurs nous ont accordé depuis deux ans. Quel surcroit de bien pour le collège, si ces prix étaient fixes et plus multipliés !

Le second motif est de prévenir la désertion des écoliers avant la fin des classes. Il est incroyable combien cette désertion est nuisible et funeste aux progrès des études. Il n’en seroit pas de même si on leur proposoit des prix. Retennus par l’espérence d’être récompensés, des travaux de l’année, ils ne penseroient point à se retirer avant le tems de la moisson, et par ce moyen l’ordre des études ne seroit point interrompu.

Le troisième motif est d’établir une égalité d’avantages entre les deux collèges. Ne seroit-il pas juste et raisonable que le collège de l’Esquille, qui est le vrai et seul collège de la ville par son institution, jouit des mêmes avantages que son rival. Cependant l’hôtel de ville fournit toutes les années deux cents livres pour des prix à ce dernier, qui luy est étranger, tandis qu’il ne donneroit rien à son propre collège. Ce motif, quoique le dernier de tous, mérite quelque considération.

Si cet établissement des prix pouvoit avoir lieu, comme nous osons l’espérer, il seroit bon que la distribution en fut fixée au dix-huit août, et que le collège se fermat en même tems. Cette anticipation des vacances, qui dans le fonds est peu de chose, procurreroit deux mois entiers de repos et de délassement aux maîtres et à leurs élèves. D’ailleurs les études ne font que languir sur la fin de l’année, à cause des chaleurs excessives de la saison, et de la désertion continuelle des écoliers, qui se sont obligés de se retirer avec leurs parens à la campagne.

Puis-je, Messieurs, d’après ce petit exposé, me flatter d’obtenir de vous, les secours que j’ai l’honneur de vous demmander pour l’établissement des bonnes études dans votre collège. Si l’amour du bien public, et le zèle pour l’éducation de la jeunesse peuvent vous décider en notre faveur, nous comptons déjà sur vos suffrages et sur vos bienfaits. »

Le 8 mars 1766, le collège de l’Esquille reçoit une réponse favorable. Il a été décidé « d’accorder au profit du collège de l’Esquille les cartes géographiques qu’il demande pour chacune des classes dudit collège et en outre un globe terrestre et une sphère pour l’usage des écoliers à la charge par les Révérends pères de la Doctrine chrétienne d’entretenir le tout ». En outre, la ville a décidé d’accorder au collège trente livres pour chaque mois de l’année afin d’acheter des prix à distribuer aux écoliers.

Par ailleurs, une liste des prix distribués pour l’année 1719 (soit près d’un demi-siècle auparavant) a été conservée :

Premier prix. Bonet avec les Odes et fables de Mr Delamote.
Second. Bonet avec les Oraisons funèbres de Mr Fléchier.
Troisième. Une épée.
Quatrième. Oeuvres de Corneille avec l’Apologétique de Tertulien.
Cinquième. Dictionnaire de Richelet avec les oeuvres de Crébillon.
Sixième. Pourchault [?] avec les oeuvres de Racine.
Septième. Oeuvres postumes de Nicole avec les oeuvres de Fontenelle.
Huitième. Bible de Saix avec un Télémaque.
Neuvième. Histoire de l’Eglise avec Pensées de Paschal.
Dixième. Abadie avec oeuvres de Tacite.
Onzième. Histoire des variations [?] avec l’Eloquence de Mr de Cambray.
Douzième. Bayle phisica.
Treizième. Phisique de Rohault avec les Panégériques de Fléchier 3 tomes.
Quatorzième. Estat de la France.
Quinzième. Oeuvres de Molière et Ca [?] Ruban.
Total de 200 livres.

Source : Toulouse, archives remarquables, Portet-sur-Garonne, Loubatières, 2012.


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